La pluie crépite dehors, et vient seule troubler le silence.
Le soleil a passé le relais à une sombre nuit humide et froide.
J’essuie une dernière fois la lame qui a été mon plus proche compagnon pendant ces cinq dernières années, envoyant plusieurs âmes dans l’autre monde. Je m’apprête à la remettre à son propriétaire – Argol - ainsi que tout l’équipement qui a permis mon initiation à l’art du combat, à la méthode la plus efficace pour tuer.
Demain, je partirai enfin.
Les adieux ont été faits, mes parents chuchotent autour de la table, près du feu qui hésite encore entre les ténèbres d’un rouge sombre et l’intensité aveuglante d’un jaune or. Ils tentent de rester dignes même s’ils n’approuvent pas ce choix : ils connaissent ma volonté et savent que j’ai décidé mon futur. Mon destin sera celui que je façonnerai.
« Voici ton équipement, Argol. Il est un peu usé bien sûr, mais on ne fait d’omelettes sans casser des œufs. »
« T’es sûr que tu veux pas le garder, Isamu ?! Je me répète, mais t’as juste 16 ans, pas d’équipement, peu d’or… Tes parents sont pas les seuls à s’inquiéter mon grand ! On dirait que t’es bien démuni pour les Terres argentées. »
« C’est là que vous vous trompez. Ce n’est pas l’équipement qui fait la force d’un guerrier. J’ai plus d’armes qu’ils ne faut pour mener à bien ma quête : volonté, courage, intelligence...
J’ai entendu une clameur provenant de ces terres. Un déséquilibre s’est créé entre les forces maléfiques et celles du bien. L’ordre doit être ramené.
J’ai toujours su que je partirai vers ces terres. Depuis quelques mois, je sais enfin pourquoi. »
Mes parents s’étaient retournés. Tous trois, avec Argol, me regardaient d’un air interdit. Ces derniers mois, justement, avaient été riches en discussions. Ce n’est pas normal qu’un adolescent ait de telles préoccupations ?
Je me moque de ce qui peut paraître normal. Ma présence n’est plus utile ici, et mon sens de la justice bouillonne en moi, me poussant en avant avec une force implacable.
« Je reviendrai peut-être, mais rien n’est moins sûr. »
Je m’approchai d’Argol, lui murmurant à l’oreille :
« S’il te plaît, continue à veiller sur mes parents comme tu l’as toujours fait. »
« T’es sûr que tu veux pas que je vienne avec toi ? »
« Nous savons tous deux que ta place est ici. La vie est devant moi, et elle commence cette nuit. »
La porte claqua une dernière fois et j’étais dehors, bravant l’obscurité.
« Isamu !!! ISAMUUU ! »
Le vent avait poussé les nuages et fait place à un ciel de cristal, que venaient percer de brillantes étoiles. Silence. Le décor alentour semblait retenir sa respiration, spectateur.
Un souffle de liberté me porta sans effort jusqu’au premier village des Terres argentées…
L’aventure !